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Mythe d'Ultimecia 2


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FINAL FANTASY VIII : LES DESSOUS D'UNE HISTOIRE

I. CONSIDERATIONS PREMIERES

I.1. Indices généraux

Deux éléments sont primordiaux pour comprendre l'histoire de Final Fantasy VIII : le pendentif Cronos (il y a aussi une bague), porté par Squall tout au long de l'aventure et apparaissant à l'écran titre ; aussi, la promesse que fait Squall à Linoa lors de leur entretien à l'orphelinat au cours du troisième disque.

Pendentif Cronos
You'll find me.
Cronos ou le lien mystérieux...
Une promesse longue durée

Disons-le d'emblée : Linoa et Ultimecia sont une seule et même personne.
C'est la révélation majeure qui aide à saisir la pertinence du choix qu'a fait Square de proposer Ultimecia comme ennemi final, choix qui reste mal compris tant que ce propos-ci, ou plutôt ce qui l'alimente, n'est pas entendu. Il est vrai qu'on ne rencontre vraiment Ultimecia qu'au moment du dernier affrontement, et vaguement au terme du disque 2 après le face-à-face avec Edea ; ces courts instants n'allouent aucun background à priori à la prêtresse du futur, contrairement à l'épouse de Cid. Quels peuvent être les arguments de cette identification d'Ultimecia à Linoa? Ils sont disséminés dans le jeu entier. Les premiers mots à lire dans la cinématique d'introduction correspondent à la promesse de Linoa à Squall, un monologue intérieur qu'elle se fait au milieu d'une prairie (cette même prairie apparaissant à la fin du jeu, suggérant le caractère cyclique de l'histoire, que je vais développer), qui fait d'ailleurs écho à la même promesse que lui fit son mercenaire préféré à l'orphelinat d'Edea :

"I'll be there. I promise" (Si tu me cherches, je te promets d'être là).

Il faut donc voir dans cette promesse un élément important du scénario, plus qu'un choix poétique pour la mise en scène d'introduction.
Lorsqu'on va reparler à Edea au début du troisième disque, après la confrontation obligée, elle dit qu'Ultimecia est hostile car en quelque sorte délaissée ; Edea elle-même reconnaît que la possession de pouvoirs magiques est une lourde responsabilité, et que le sorcier peut être tenté de les dévier de l'intérêt universel, auquel de tels potentiels sont pourtant dévolus par nature. Le seul vaccin qu'Edea reconnaisse contre la corruption du sorcier est une personne, à qui il puisse entretenir une relation de proximité, malgré un destin de solitude assez inévitable. Edea explique que c'est l'amour de Cid, donc son "chevalier", qui lui valut de rester toujours sur le "droit" chemin, et que d'amour Ultimecia en a vraisemblablement été privée, du moins c'est ce qu'elle suppose.
I.2. Déterminations

Il faut, avant de continuer, que j'approfondisse mon point de vue par rapport au statut des sorcières et chevaliers. Dans des dialogues on parle de la mission du Seed : "Dans le Garden pousse le Seed, destiné à combattre la sorcière". Il apparaît que, malgré le nombre de sorcières et sorciers cités, l'on s'entête à parler des représentants de ce statut au singulier, sans indiquer, si elle est possible et comme elle n'est jamais démentie, leur nombre existant dans la simultanéité. Les sorciers dans Final Fantasy VIII sont d'ascendance divine (notons également la synonymie admise dans le jeu, entre les termes "sorcier", "magicien", "nécromancien" et "prêtre", qui suggère vraisemblablement différents aspects de la fonction au monde des entités particulières telles qu'Edea). Ils descendent en effet de Hyne, créateur du monde et premier sorcier de l'Humanité, qui transmit ses pouvoirs à quelque élu, pouvoirs qui se transmirent encore, de génération en génération.
Dans de nombreuses religions, telles que celle des Incas par exemple, les descendants d'un dieu sont considérés de nature divine eux aussi (chez les Incas il s'agissait de l'empereur, ou Fils du Soleil). Je pense que c'est la raison pour laquelle on use du singulier pour citer les sorciers de l'Histoire, parce qu'ils sont en fait de nature exceptionnelle et divine : même dans le cas de religions polythéistes, comme celle des grecs anciens, les spécialistes s'accordent à ramener les différents dieux aux différentes facettes d'une même entité divine. De la même manière, le Père, le Fils et le Saint-Esprit ne font qu'un dans la religion chrétienne, comme nous le savons. On peut sans doute comparer Jésus-Christ aux personnes occupant le statut de nécromancien, dans la mesure où Il est Dieu incarné ; Dieu venu laver les péchés du monde, en se soumettant au devenir et s'exposant à la mort. Cependant, sa résurrection annoncée suggère que "l'âme" de Jésus, qui est aussi sa nature divine habitait son corps puis lui a survécu. Le divin échappe au devenir, ainsi les pouvoirs de Hyne survivent à la mort d'un "avatar" temporaire. On entend par "avatar", l'enveloppe charnelle qui est liée à des pouvoirs magiques. Ce terme, car il exprime bien le rapport qu'on peut qualifier d'osmose, qui unit cet avatar aux pouvoirs. L'avatar n'est donc pas qu'un "porteur". Relativement, les termes néologiques "avatarisation" et "avatariser" seront proposés dans des cadres bien précis, signifiant respectivement l'incarnation osmotique des pouvoirs en un avatar, et le fait d'intégrer [en soi] leur nature, et les potentiels relatifs.

N.B. 1. Le terme "investi" sera utilisé dans le cas bien précis où un sorcier a été possédé par un autre. Ce qui, en dehors de la compression, n'assure pas de réelle avatarisation du pouvoir par le "possédé".
2. Le terme "replica" désigne un être pris dans une répétition de lui-même, lors de la rencontre simultanée de plusieurs de ses moments d'existence. C'est la conséquence d'une irrégularité temporelle, à cause déterminée. En dehors de la mise en présence réelle de "clones", il existe évidemment des décalages, dus au décalage temporel qui sépare les replicas. Nous nous en tiendrons à considérer l'être des replica- d'une manière volontairement idéaliste- et non leur état physique ou moral d'un moment, pour les identifier comme existence unique.

Adel et Linoa fusionnées
Adel et Linoa fusionnées
(fin du disque 3)
Dans le jeu, on n'a affaire officiellement qu'à un seul cas de coexistence dans le même espace-temps de deux magiciens (Edea avec les pouvoirs reçus durant son enfance et Adel, d'une part: la fin du troisième disque me semble indiquer que leurs pouvoirs respectifs ne devaient former qu'un à l'origine, vu qu'Adel et Linoa y fusionnent, puis que seule cette dernière survit, emportant logiquement en elle la somme des pouvoirs réunis vers son éventuelle métamorphose en Ultimecia- on peut en déduire, dans cette histoire cyclique, qu'Adel hérita ses pouvoirs de la prêtresse du futur, ce que j'expliquerai), avant qu'Ultimecia ne transmette ses propres pouvoirs à Edea puis à Linoa, forçant la coexistence à l'état de nécromancienne d'Edea (puis Linoa) et Adel, souverain(e) hermaphrodite d'Esthar. Ladite coexistence m'apparaît comme une transgression, conséquence de la haine d'Ultimecia. La sorcière d'une époque possède la divinité (dans le sens de qualité divine) y correspondant au niveau temporel, on assiste donc à une sorte de représentation de Dieu sur Terre, Hyne n'étant plus présent au monde qu'à travers les pouvoirs cédés aux hommes, d'où le titre de "prêtresses" pour les sorcières, et, vraisemblablement, de "prêtres" pour leurs homologues masculins, s'il en fut ; on en retiendra l'évocation d'une certaine religiosité de la fonction du magicien. Insistons sur un fait : ce sont les pouvoirs des sorciers qui ont cette qualité divine, pas les sorciers eux mêmes. La divinité des pouvoirs est confirmée par l'impossibilité pour un sorcier de mourir sans les transmettre, car si son corps peut s'évanouir, ce n'est pas le cas de sa "magie". "Avatarisés", donc métabolisés par l'avatar, les pouvoirs ne restent en osmose avec lui qu'un temps donné. Au terme de cette période, ils pourront se désolidariser complètement de l'ancien avatar, de même celui-ci ne conservera rien de magique en lui. Bien sûr, il lui sera encore possible de recourir à ce qu'on nomme "Para-Magie".
I.3. Nécessité de relation

Le statut de sorcier est exceptionnel et lié au devenir du monde, amené à le réguler au même titre que celui de chevalier- ce dernier étant de nature à canaliser la puissance du sorcier de son époque, et épargner au monde des transgressions comme celle d'Ultimecia. Je n'ai aucun mal à imaginer qu'une personne humaine investie de pouvoirs cosmiques, réclame un rapport intense à autrui. Car l'inadéquation de l'avatar est double : inadéquation à la substance (l'universel, auquel ont trait les pouvoirs) et à l'ensemble de la réalité concrète. L'empathie avec un être humain (dont la place dans l'ordre du monde est moins significative) est une façon d'échapper à cette véritable "mise en balance" du magicien, bloqué par sa nature ambivalente entre le divin et l'humain. Le sorcier a besoin d'amour pour manifester son humanité et pencher vers elle. Sans relation, il devient inhumain en oubliant sa part d'humanité.

Squall perdu
Squall perdu
Edea a eu Cid, et fut bienveillante jusqu'à sa possession par la prêtresse du futur, Adel (son hermaphrodisme semble le souligner) était seul(e) avec elle/lui-même, donc tyrannique, et Ultimecia devait avoir Squall (pour ne pas sombrer dans le désespoir), qu'elle a eu d'une certaine manière que nous conte la fin, précisons : la mort physique d'Ultimecia correspond à sa naissance psychologique (encore une fois, suggestion de l'immortalité de l'âme, incarnée, dans le cas d'une sorcière, dans ses pouvoirs, et d'un cycle éternel, propre au divin, ce qui n'a pas de devenir) puisque c'est au moment où Ultimecia disparaît que Squall est séparé de Linoa : il est le seul du groupe qui ne puisse retourner chez lui directement (et peut-être sa perte est-elle l'oeuvre dernière d'Ultimecia qui s'assure ainsi d'apparaître), et il erre sans fin dans une faille spatio-temporelle. Je pense que c'est à la mort de Squall qu'on assiste dans la cinématique de fin, quand il tombe à genoux sur un fond blanc (le blanc pouvant être interprété comme couleur de la mort- ainsi que de la pureté, ce que j'expliquerai plus loin), et qu'une plume blanche choît au sol.

Ce faisant, je pense que le choix des scénaristes aura été d'imaginer l'apparition d'une fracture temporelle, la naissance de deux éventualités, avec dans l'une*, Squall mourant seul et condamnant Linoa à l'attendre pour le reste de ses jours, enclenchant un compte à rebours du désespoir dans le coeur de la belle, qui aboutira à l'avènement d'Ultimecia, en d'autres mots, Linoa désabusée ; et dans l'autre éventualité, Linoa retrouvant son bien-aimé inanimé, le ramenant à la conscience et les rendant à même de couler des jours heureux ensemble (ce que raconte la fin).


II. ELUCIDATIONS

II.1. Adel et le pouvoir

Une remarque importante, pour compléter au sujet d'Adel et l'origine de ses pouvoirs: en se basant sur la cohérence intrinsèque de ce scénario complexe, il est improbable que tout en faisant partie du cycle de la vie d'Ultimecia- ce que l'on constate en cours de jeu, Adel ait hérité ses pouvoirs d'un mage X, non cité. Le fait que Linoa conserve ses pouvoirs et la fonction "Canonisation" après la fusion avec lui/elle, semble évoquer que les pouvoirs d'Ultimecia avaient été dédoublés : ceux du présent ("avatarisés" par Linoa, issus directement d'Edea) se séparent de ceux du futur (d'Ultimecia) à la mort d'Adel. L'hermaphrodite ne peut mourir avant de transmettre ses pouvoirs, ce qu'il/elle ne fait pas visiblement. Et pour cause ! Le transfert s'est effectué durant la fusion. Ainsi que la précision en est apportée dans la version japonaise de la soluce officielle de Final Fantasy VIII, Ultimecia hérite ses pouvoirs d'Adel. Evoquons ici la possibilité d'un dédoublement des réalités au moment de la mort d'Adel. Il a déjà été avancé que Linoa ne peut être Ultimecia car jamais elle n'aurait atteint le statut de nécromancienne sans l'intervention de cette dernière. On constate néanmoins l'objection faite, par l'origine même des pouvoirs d'Ultimecia, invoquée par la dite soluce japonaise (source pour le moins officielle): Adel.
Suivez donc le raisonnement: si Adel meurt à la fin du cd3, et comme elle a fusionné avec Linoa, cette dernière emporte logiquement ses pouvoirs puisque Adel meurt après le combat (ce qui aurait été impossible si elle ne s'en était pas libérée). D'ailleurs, ainsi qu'il a déjà été dit, Linoa conserve l'usage de "Canonisation" au CD4, donc (on cite, le glossaire) de "la manifestation de ses pouvoirs de nécromancienne". Or, Ultimecia déserte le corps de Linoa après la défaite d'Adel, grâce à l'intervention d'Ellone. Adel reste seul(e) possédé(e) juste avant la compression, et Linoa avatarise encore ses pouvoirs. C'est qu'elle garde de son côté la magie héritée de Edea, ainsi que celle d'Adel, acquise par la force des événements ; Adel, quant à lui/elle, possède seulement les pouvoirs d'Ultimecia au moment où se compresse le temps. Soulignons le fait que les pouvoirs d'un sorcier sont véritablement "reliés" à un corps à la fois (exception faite du cas de possession): c'est leur incarnation physique, et leur condition d'existence au monde. Il est donc logique qu'un dédoublement se soit opéré dans la mesure où la prêtresse du futur, Ultimecia, dont l'âme et les pouvoirs sont en Adel, garde son identité de corps avatarisé cependant qu'Adel doit être avatarisé(e) par la même énergie, préservatrice de son intégrité physique, le temps que s'accomplisse la compression. Ce moment étant à la fois très court et très long, dilatation d'un clignement d'oeil à l'éternité même, Adel a eu l'occasion d'emporter "son" pouvoir avatarisé vers un passé qui le/la concerne, alors qu'Ultimecia gardait le sien. Eclaircissons ce schéma. D'emblée vous pourriez émettre une réserve : on a dit que le pouvoir avatarisé par Adel s'est transmis naturellement à Linoa durant la fusion. Donc, Adel n'aurait plus de pouvoir pour lui/elle. Mais c'est pourtant le cas, puisque Adel continue d'être possédé(e), donc investie jusqu'à la compression. Au moment où cet événement magique se déclenche, Ultimecia est avatarisée par le même pouvoir que Adel, qui jusque là se contentait d'en être investi(e) comme il/elle était possédé(e). Il/elle devient avatar des pouvoirs d'Ultimecia au moment où les époques fusionnent, puisque la compression cause logiquement un effet "replica".

C'est ma théorie sur l'origine des pouvoirs d'Adel- périphérique à celle sur Ultimecia, qui ne fait pencher la balance identitaire dans aucun sens. Seulement elle souligne l'aspect cyclique de cette véritable "histoire des pouvoirs", et que la révélation de la soluce japonaise n'entrave pas la possibilité d'une identification de Linoa à la maîtresse de Cronos, parce que si Adel transmet ses pouvoirs à Linoa dans le cd3, elle les transmet en fait à Ultimecia. Parallèlement à cela, Adel a pu vraisemblablement emporter la replica des pouvoirs d'Ultimecia dans un certain passé.


II.2. Théories sous-jacentes

Cette élucidation m'amène à théoriser au sujet de la compression. La question est : pourquoi Ultimecia a-t-elle eu besoin de se projeter dans le passé pour compresser le temps ? Pour répondre à cela, interrogeons la nature même de la compression : si l'on pouvait se visualiser soi-même sur une ligne du temps, nous occuperions un point unique. Or, pour "tordre" cette ligne, et en faire un cercle parfait, il faudrait avoir deux appuis. Mais, le temps lui-même est à confondre avec l'éternité. Dès lors, on ne pourrait directement faire un cercle de la ligne du temps, car il n'y a pas d'extrémités de cette ligne à faire se toucher. Cependant, comme tous les événements ont une localisation dans le temps, et que tout instant est positionné par rapport aux autres, le fait de créer une boucle, ou plutôt un "noud" avec la matière du temps reviendrait à "tirer" l'éternité positive (le futur) et négative (le passé) vers cette boucle. Ainsi, plutôt qu'une "compression", le temps subirait une contraction. Si l'on fait un parallèle avec le dynamisme de l'Univers, on peut imaginer qu'après toute contraction doit avoir lieu une dilatation. Mais cela est une autre histoire.

La théorie de l'unicité des pouvoirs reste valide malgré les dédoublements temporels évoqués plus haut. Le pouvoir unique est dédoublé dans l'Histoire, à cause d'Ultimecia, comme un être humain qui se déplacerait physiquement dans le temps serait à même de rencontrer son double. Cette possibilité est d'ailleurs évoquée par la fin du jeu, au cours de la compression lorsque Squall peut rencontrer son "replica" enfant. La seule chose certaine qu'implique la compression à ce niveau des "replicas" est donc la possibilité pour eux d'exister simultanément, pouvant exister/vivre- et logiquement mourir (pour les êtres, non les pouvoirs)- en bref "devenir" indépendamment.
II.3. Indices formels

C'est considérant la première éventualité* que les mots d'Ultimecia durant la dernière phase du combat final prennent tout leur sens : "Le temps n'attends pas, quoi que tu fasses, quel que soit ton désir, le temps s'écoule comme du sable".

Bahamut
Acarnan
Bahamut (G-Force)
 
Acarnan (boss)
 
Monarch
Minotaure
Monarch (passé)
Minotaure (futur)

On peut deviner Ultimecia grâce à d'autres indices : comme ce boss Acarnan, clone de Bahamut, qui peut être interprété comme un souvenir qu'avait Ultimecia de cette G-Force, ou encore Minotaure comme celui de Monarch (toute quête annexe offerte par le jeu étant potentiellement le vécu de Linoa/Ultimecia, même si la pertinence de tout cela est soumise à l'assiduité du joueur). Egalement, lorsque Edea est contrôlée par Ultimecia et utilise Ice Strike sur Squall, on dirait qu'elle rate les organes vitaux du thorax (puisqu'il survit à la blessure) : on peut y voir un acte manqué, de l'amoureuse Linoa qui accuse une réminiscence de son amour pour le jeune Seed.

ICE STRIKE : Une attaque puissante, qui "échoue" de peu

Ensuite, comme on l'a dit d'emblée, le pendentif et la bague Cronos sont très importants, dont Ultimecia aura tiré l'inspiration pour créer sa G-Force éponyme (encore une fois, caractéristique divine, l'aptitude à créer la vie). Pourquoi aurait-on donné la possibilité au joueur de renommer Cronos (au moment de pénétrer le Galbadia Garden, disque 2), si ce n'était pour souligner la connexion étroite entre cette confidence sur la bague, que fait Squall à Linoa/Ultimecia, et la G-Force qui seconde le boss final ? Il faut voir dans la possibilité donnée de rebaptiser Cronos un réel indice, à l'utilité rétroactive. Cronos est donc le lien entre Squall et la Linoa du futur, donc Ultimecia ; ce lien est symbolisé par le pendentif que Squall possède, et la bague Cronos qu'il offrit à Linoa dans le "présent".

Tunique de Linoa
La tunique de Linoa
Encore un indice qu'on nous cède : les ailes d'Ultimecia. Elles rappellent celles que déploie Linoa lors de l'utilisation de sa fonction "Canonisation", qui sont par ailleurs imprimées dans le dos de son vêtement, entre les omoplates. La différence entre ces deux paires d'ailes réside dans leur couleur, Linoa ayant des ailes blanches comme celles d'une colombe (un peu de poésie n'a jamais fait de mal), et Ultimecia de sinistres ailes noires. C'est à ce niveau qu'il faut interpréter le blanc comme couleur de la pureté, de l'innocence, ce que connaissait relativement Linoa avant le grand drame de sa vie, la perte de Squall (qu'elle n'aura pu connaître que comme une disparition).

Le symbole de la plume blanche
La plume blanche comme symbole

Au moment de la mort de ce dernier donc, que je situais plus haut, une plume blanche esseulée tombe au sol : j'y vois la métaphore d'une mort psychologique pour Linoa, dans ce qu'elle était de pureté (et aussi, mais de façon humoristique entre nous, une illustration de l'expression perdre des plumes) et le signe de l'isolement dans lequel elle va tomber, puisqu'on voit bien dans l'introduction du jeu que ces mêmes plumes blanches proviennent de Linoa sur la prairie. Le vent agité qui l'entourait en chassant les plumes, retombe dans le silence au décès de son bien-aimé. L'Ultimecia "corbeau" est donc la colombe Linoa brisée.

La colombe Linoa brisée
L'Ultimécia corbeau

Le vrai but d'Ultimecia n'est jamais clair, et ne nous apparaît qu'au travers de suppositions d'Edea. Qu'elle ait souhaité recourir à la compression temporelle pour recueillir en elle les pouvoirs des nécromanciens de toutes les époques ne semble pas cohérent, par rapport à la qualité transgénérationelle du pouvoir. Car il s'agit bien d'un seul pouvoir, celui que Hyne a conféré, le pouvoir suprême qui passe d'une génération à l'autre, à une personne chaque fois, comme nous l'avons postulé. Ultimecia le possède déjà, il est arrivé jusqu'à elle !
Les faisceaux d'indices suggèrent plutôt qu'Ultimecia attend la fin de son attente. Elle espère Squall depuis si longtemps, que l'incertitude et le manque causé par son absence n'ont fait que croître. Que passé, présent et futur ne fassent qu'un est une solution envisagée par la prêtresse pour mettre fin au temps qui passe dans l'expectative, car si ses pouvoirs divins échappent au devenir, ce n'est pas le cas de la femme, qui ressent le poids des années.
Si l'on se fait une idée du schéma d'ensemble qui se dessine, on se rend compte que toute l'histoire entre dans une bulle, un cycle : Ultimecia meurt en assurant son apparition en tant que personne malfaisante, qui par cause de ses méfaits sera abattue. Tout le reste vient entre ces deux moments : mort physique et naissance psychologique (moments identiques au niveau temporel puisqu'à sa mort le temps ne passe plus, je trouve ça incroyable en l'écrivant !). Cette donnée renforce encore l'empathie qu'on peut ressentir d'avec Ultimecia, prisonnière d'une spirale sans fin (pour la blague, les sociologues l'appelleraient "cercle vicieux de la misère") dans laquelle il n'est rien d'autre à faire que patienter dans son château (sympa, dans le genre néo-gothique flippant) après le meurtre de tous les Seed du monde.
La seule part de scénario qui quitte la bulle, c'est la fin bienheureuse, l'éventualité seconde.

Happy End
La citadelle : pas une colonie de vacances
Un happy End ?

 

III. DES PREUVES QUI VIENNENT TOUT CASSER ?

III.1. L'argument des générations

Une preuve prétendument définitive a été avancée, pour briser cette théorie d'identification de Linoa à Ultimecia. Intéressante, elle reposait sur une phrase d'Edea au début du disque 3. "Ultimecia est une sorcière du futur, elle apparaîtra dans de nombreuses générations". La preuve correspondrait à l'interprétation de cette phrase de manière à nier la possibilité qu'Ultimecia soit déjà née à l'époque du scénario, et de ce point de vue, ce ne pourrait être Linoa. J'estime l'avoir annulée par les raisonnements suivants :

a. Si l'on ne dit à aucun moment que Edea a le moindre don de voyance, ce qui n'est cependant pas impossible vu qu'elle connaît le nom de son manipulateur, il n'est fait aucune allusion à une vision claire qu' Edea aurait eue de l'avenir. Elle ne peut prétendre savoir exactement le nombre de décennies écoulées entre la naissance de Linoa, et la provenance temporelle de visions éventuelles. Ceci rend déjà la "preuve" peu solide.
En fait, Edea ne doit savoir d'Ultimecia que ce qu'elle apprend au contact de Squall à l'orphelinat, au moment de la transmission des pouvoirs (disque 4). C'est à cette occasion d'ailleurs qu'elle apprend la future création du Seed, et qu'elle doit préparer le monde à combattre la sorcière qui posera problème (et donc le but du Seed n'est pas, comme on le lit trop souvent, de détruire toutes les sorcières, mais seulement de détruire la menace prévue, Ultimecia).

b. Comme on peut légitimement supposer que les caractéristiques biologiques des êtres humains dans le jeu sont calquées sur les nôtres, et comme nous sommes programmés pour vivre 120 ans (6 générations), il n'est pas impossible que Linoa soit devenue Ultimecia, car plusieurs générations peuvent largement être englobées par sa seule durée de vie. Quant à interpréter la portée de l'adjectif "nombreuses" utilisé par Edea, qui serait fou pour s'y risquer ?

c. En plus, mais cet énième argument est gratuit, l'excellente forme physique d'Edea et Ultimecia (cette dernière aux cheveux grisonnants évoquant un âge avancé) suggère que leurs pouvoirs leur confèrent une extraordinaire longévité. A propos de cette "transformation" de Linoa, notons bien qu'elle est d'ordre psychologique, ce qui techniquement prend du temps, ne s'opère pas comme une métamorphose subite. C'est ce qui résulte du désespoir de la jeune fille.


III.2. L'argument du "suicide"

La "preuve" était secondée par un argument qui se résume comme suit : Ultimecia a menacé la vie de Linoa à plusieurs reprises. Si elles sont confondues, Ultimecia se détruirait en détruisant Linoa. Là on peut faire intervenir le savoir que des "replicas" sont à même d'exister indépendamment, cela étant prouvé par la rencontre des deux Squall- si dans de nombreuses histoires de manipulations temporelles on craint la rencontre de deux fois la même personne, et des conséquences de cette rencontre, il n'en est pas question dans Final Fantasy VIII. Donc, Ultimecia n'aurait rien à craindre, d'autant qu'elle ne pourrait se tuer elle-même à une autre époque, pour une question de logique. Sans crainte de se nuire, il n'en demeure pas moins un caractère autodestructeur de son comportement...


III.3. La taxation de "circular reasoning"

Le "raisonnement circulaire", ou "circular reasoning" est ce dont on taxe le plus souvent les défenseurs de la théorie de l'identification. Il s'agit d'une idée que l'on se fait à l'avance, des résultats d'une recherche, et dont on se sert pour interpréter les résultats effectifs. Ce procédé incombe une certaine partialité, qui décrédibilise la démarche.
Il faut dénoncer les préjugés nécessaires à une taxation de raisonnement circulaire dans ce cas de l'identification de Linoa à Ultimecia. Car pour découvrir la vérité des scénaristes, et non tomber dans le piège du parti pris, il s'agit d'observer les indices, et considérer les pistes qu'ils suggèrent. Il y a abondance d'éléments dans le jeu, et parmi ceux qu'on a évoqué dans le texte, qui peuvent naturellement pousser une personne à penser que Linoa est Ultimecia. Par exemple, le rapport que j'ai déjà évoqué, entre Cronos (Griever) et Ultimecia, ne peut être vu comme une simple coïncidence, pas plus que la signification même du nom "Griever" dans la version américaine... Les défenseurs de la théorie de l'identification ne doivent pas négliger l'aspect factuel, mais les gens qui la nient non plus. Les adversaires à l'identification ne peuvent nier les nombreuses connexions effectuées par le jeu lui-même, et relevables d'une manière spontanée. Beaucoup d'indices forcent notre compréhension dans certaines directions. De fait, pour adhérer à l'identification, il n'est pas nécessaire de postuler qu'une théorie est probablement juste si on ne peut l'écarter. Celle-ci est du domaine du plausible, bien qu'impossible à vérifier. La théorie de l'identification existe avec autant de légitimité que toute thèse opposée. Celui qui la réfute doit faire face à autant d'incertitudes que l'adhérent ! Et si l'histoire est un cycle - avec les pouvoirs magiques de l'avenir voyageant dans le passé - il n'y a pas de "nécessité circulaire" dans le fait de suivre naturellement les pistes que suggèrent des faisceaux d'indices.


IV. CONCLUSION

Finalement, j'ose croire que les éléments apportés par cet essai confèrent à Ultimecia toute sa légitimité en tant qu'adversaire terminal, poste à haute responsabilité dans la série FF, surtout depuis Sephiroth. Elle fait partie intégrante du jeu, malgré les apparences qui tendaient à la reléguer au rôle de personnage brouillon à l'apparition tardive, boss improvisé presque en catastrophe, comme si les échéances données aux programmeurs pour la sortie du jeu avaient été raccourcies inopinément. Ce scénario de Final Fantasy VIII se révèle peut-être bien le plus subtil qu'on ait vu dans un FF. Il vaut sans aucun doute celui du septième opus, même si ce n'est pas en termes d'accessibilité !

par Marcus


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